Nucléaire : le Japon va rejeter l’eau contaminée de Fukushima après traitement

Le Japon se résout à se débarrasser des centaines de milliers de litres d’eau ayant été utilisée pour refroidir les réacteurs de la centrale nucléaire de Fukushima, dont les cœurs sont entrés en fusion il y a 10 ans. 

Les eaux de la centrale nucléaire de Fukushima devront respecter les normes de sécurité

C’est après des années d’hésitation que le gouvernement japonais a annoncé, mardi 13 avril, qu’il comptait rejeter très progressivement, et à partir de 2023, l’eau contaminée ayant participé au refroidissement des réacteurs de la centrale nucléaire Fukushima Dai-ichi. 

Le Premier ministre, Yoshidide Suga, a levé le doute quant à l’éventuelle dangerosité de la manœuvre : l’eau sera rejetée « après nous être assurés qu’elle est à un niveau [radioactif] nettement en-dessous des normes de sécurité. » Le gouvernement a également assuré que des « mesures » seront prises pour que ce déversement n’entache pas la réputation de la région et « que les rejets dans l’océan sont réalistes, dès lors qu’ils seront réalisés en toute sécurité. »

Saturation des capacités de stockage de l’enceinte de la centrale nucléaire

Cette décision est motivée par la prochaine saturation des capacités de stockage de l’enceinte de la centrale, fin 2022. L’opération doit donc commencer dans deux ans et va prendre des décennies, le gouvernement devant au préalable recevoir le feu vert de l’Autorité de régulation du nucléaire (ARN), l’équivalent de l’Autorité de sûreté nucléaire française (ASN).

Les gestionnaires et industriels de la centrale appellent, depuis des années, à un rejet de ces eaux afin de libérer de la place au sein des réacteurs et libérer la main-d’œuvre présente sur place. Mi-mars, c’est plus de 1,25 million de tonnes d’eau contaminée qui était contenue dans un millier de réservoirs. 

En effet, 80 % de l’eau stockée ne respecte toujours pas les normes environnementales, en dépit d’une filtration par ALPS (Advanced Liquid Processing System) qui a tout de même pu faire diminuer la part de substances radioactives dangereuses. Mais l’eau contient encore du tritium, difficilement éliminable à l’aune des technologies actuelles. 

Le premier filtrage a pu détecter 62 nucléides supérieurs auxdites normes. Un second est prévu et sera complété par une dilution permettant à cette eau de respecter les normes.

La défiance de la population japonaise et des pays voisins

Malgré la prudence du Premier ministre japonais, la population remet en cause cette décision survenant après sept années de longs débats autour de l’eau contaminée. Association de pêcheurs, ONG et population locales craignent que ces rejets n’aient encore un impact sur leur quotidien. 

Kanji Tachiya, responsable d’une coopérative locale de pêche à Fukushima rappelait, à la chaîne de télévision NHK Kanji Tachiya, avant les annonces, que le gouvernement ne prévoyait pas de rejeter l’eau « sans l’adhésion des pêcheurs », avant d’ajouter que « maintenant, ils reviennent là-dessus et nous disent qu’ils vont rejeter l’eau, c’est incompréhensible. »

Greenpeace plaide pour un stockage de l’eau tant que la technologie reste un facteur limitant à la décontamination de l’eau. L’ONG a déclaré, dans un communiqué, que « la décision de rejeter de l’eau contaminée dans l’océan va laisser d’énormes ennuis pour l’avenir. » Certains écologistes de Greenpeace estiment quant à eux que le Japon a opté pour « la moins chère des options. »

La Corée du Sud a exprimé ses « vifs regrets » et craint « un risque pour l’environnement maritime », quand la Chine évoque une « décision irresponsable. »

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