Climat : Shell sommé de réduire ses émissions de CO2 de 45 % par le tribunal de La Haye
Le procès du « peuple contre Shell » s’est passé à l’étranger mais ne manque pas de faire grand bruit. Aux Pays-Bas, la justice a sommé Shell de revoir à la hausse ses objectifs en réduisant ses émissions de 45 % d’ici à fin 2030 (soit 5 ans avant l’objectif de 2035 que la compagnie s’est fixée) et d’agir rapidement pour le climat.
Shell doit faire plus
C’est à la mi-février que nous apprenions que le géant pétrolier compte faire baisser son intensité carbone de l’ordre de 20 % d’ici à 2030 et – 45 % d’ici à 2035. Trop tard pour la justice néerlandaise qui « ordonne à Royal Dutch Shell de réduire ses émissions de CO2 d’ici à fin 2030 de 45 % nets par rapport à 2019. »
Le tribunal de La Haye a donc suivi les conclusions des ONG qui estiment que de nombreux groupes et autres industriels ne déploient pas assez d’efforts et de moyens pour réduire leurs émissions de CO2.
La Cour constitutionnelle avait été saisie par la branche Pays-Bas des Amis de la Terre, une ONG internationale de protection de l’environnement et de l’Homme. La saisine était appuyée par six autres organisations environnementales et 17 000 co-demandeurs qui se sont constitués partie civile.
La justice a également avancé que la séquestration de CO2 ne peut s’inscrire dans une politique durable de réduction de gaz à effet de serre. Les Amis de la Terre regrettent que « seuls 5 % [des investissements] financent les énergies renouvelables. »
Le tribunal de La Haye pointe également le fait que Shell est responsable des émissions de ses clients et fournisseurs et que le groupe doit se plier immédiatement au jugement.
« Un signal envoyé à toutes les entreprises polluantes » pour le climat
Cette décision ne manquera pas de faire parler d’elle et prend des airs de jurisprudence puisqu’elle marque un tournant historique. Le directeur des Amis de la Terre Pays-Bas salue le fait que « pour la première fois, un juge reconnaît la responsabilité d’une entreprise dans la crise climatique et que cela doit cesser », et se veut optimiste pour les années futures : « Nous pouvons encore éviter le pire. »
Il ajoute en outre que « partout dans le monde, c’est un signal envoyé à toutes les entreprises polluantes, elles ne peuvent plus attendre, elles doivent appliquer l’accord de Paris. Shell est le premier, mais pas le dernier. »
Les Amis de la Terre Europe (Friends of the Earth Europe) a fait part de son enthousiasme à la suite de cette décision et évoque une « énorme victoire pour la justice climatique » et rappelle qu’une partie du pays est déjà en proie au changement climatique et à la montée des eaux.
Tears. of. joy. ?WE WON! ?
The Dutch court just ruled Shell must cut its CO2 emissions by 45% by 2030 (relative to 2019 levels).
The climate fight is enormous but we know we can win this thing, beat fossil fuel companies and build a better world. ❤️#StopShell pic.twitter.com/MCGHyfI9Gf
— Friends of the Earth Europe? #BlackLivesMatter (@foeeurope) May 26, 2021
Une décision « décevante » pour Shell
De son côté, Shell a pris acte de la décision qu’il qualifie de « décevante » et évoque une décision politique. Pour autant, le groupe a fait savoir qu’il avait bien pris des mesures s’inscrivant dans la transition énergétique avant d’indiquer qu’il fera appel.
Il y a quelques mois le groupe pétrolier annonçait dans un communiqué qu’il allait investir près de 3 milliards de dollars par an au profit de l’hydrogène et « offrir [aux] clients les produits et services qu’ils veulent et dont ils ont besoin, des produits ayant le plus faible impact environnemental », dixit Ben van Beurden, président-directeur général de Shell.